Par Alain-Jacques Czouz-Tornare, Docteur ès Lettres de la Sorbonne
Historien des relations franco-suisses et Chevalier de Rondmons
Le vestibule de la Résidence de France à Berne donne immédiatement le ton. Bien encadré au dessus du portrait du président de la République et des drapeaux français et européens, un congé militaire du régiment suisse d’Erlach décerné au nom de Louis XV, clin d’œil quelque part à l’hôtel d’Erlach qui abrita un temps au XIXe siècle l’ambassade de France. En parcourant les salons, outre la représentation du renouvellement de l’Alliance de 1663, pas moins de trois gravures font référence à celle de 1777. Tout rappelle en ce lieu, les vieux liens exceptionnels qui ont unis la Confédération à celle qui fut si durablement sa plus proche voisine. A n’en point douter, l’ambassade de France à Berne revêt un caractère particulier et pas seulement du fait qu’elle représente une forme de consécration pour tout diplomate blanchi sous le harnais.
Rares sont les Français qui connaissent le rôle exact joué par la Suisse et les Suisses dans leur histoire. Et réciproquement! Les relations franco-suisses sont d’une très grande originalité, les deux entités s’étant globalement toujours ménagées l’une l’autre. L’année 2016 marque le 500e anniversaire de la Paix perpétuelle entre la France et la Confédération suisse. Le 2e plus ancien traité toujours en vigueur dans le monde continue à donner aux relations franco-suisses ce caractère d’échanges permanents et à multiples facettes, à nul autre pareil. Relations déséquilibrées serait-on tenté de déclarer un peu rapidement. Sur la longue durée, la France eut longtemps un grand besoin de Suisse(s) tant pour assurer sa sécurité intérieure que pour protéger une frontière orientale particulièrement exposée. Inversement, cet élément pacifiant et équilibrant qu’était la France pour la Confédération supposait pour celle-ci le maintien d’une France forte et centralisée. La relation était gagnante-gagnante. D’où vient ce lien privilégié ?